Le jour où elle s’est aperçue qu’en fin de compte, dans sa famille, il n’y avait plus qu’elle qui ne jouait pas au rugby, Florence est devenue… Dirigeante !, histoire d’amener elle aussi sa contribution à notre sport préféré. Nul ne s’en plaindra, et surtout pas les Féminines du Rugby Club Massy Essonne, qui ont du même coup hérité, non seulement d’une dirigeante émérite, mais bien plus que cela : une seconde « maman » (sauf pour Clémence, pour qui Florence sera toujours la première !), ou une « grande sœur »… Tout dépend par quel bout de la lorgnette on voit le monde…
Et c’est avec passion, conviction, et émotion, qu’elle nous a raconté « son » rugby, un rugby dans lequel les filles sont en train de rattraper le temps perdu sur les garçons, puisque ça fait maintenant belle lurette qu’elles aussi savent « plaquer » et « botter en touche »… Et oui, le monde a changé, et celui qui tourne ovale également : désormais, la passion du jeu de rugby est aussi intense (voire plus ?) chez les filles que chez les gars, et c’est tant mieux !… Merci Florence !
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Côté Rugby
Bonjour Florence, peux-tu nous dire pourquoi et comment le rugby est apparu dans ta vie ?
Chez moi, le rugby, c’est vraiment quelque chose de « familial », impulsé par mon mari, qui était rugbyman, et qui a été relayé par mon fils, et… Ma fille !
Mon fils, Florian, qui a 27 ans, joue depuis une vingtaine d’années, et j’ai bien sûr suivi toutes ses étapes : ses débuts à l’école de rugby à Longjumeau / Epinay, puis à Chilly-Mazarin Savigny, au Stade Français en Cadets (où il était entraîné par Fabrice Landreau), Massy où il a joué 6 saisons, et enfin Six-Fours-Les-Plages, près de Toulon, où il joue actuellement en Fédérale 3, au poste de talonneur.
Et puis, donc, il y a également ma fille, Clémence, qui a 23 ans et qui joue à… Massy ! J’avoue qu’au début on a un peu freiné des 4 fers parce qu’on ne voulait pas qu’elle joue au rugby (on pensait, à tort, que ce n’était pas fait pour les filles…). Mais elle a tellement baigné dans ce sport et son ambiance depuis toute petite, qu’elle s’y est mise, à 17 ans. Elle est hyper mordue de rugby, et elle joue n°8 dans l’Equipe Féminine du RC Massy Essonne.
Tu es dirigeante au sein du staff des Féminines du RC Massy Essonne, qui évoluent depuis cette année en Fédérale 1. Peux-tu nous présenter dans les grandes lignes cette section ?
Oui, j’entame ma 3ème saison de dirigeante avec les filles. Au niveau de l’organigramme du club, nous sommes rattachées à l’Association du Rugby Club Massy Essonne.
Cette année nous sommes montées en Fédérale 1, et nous avons donc dû nous organiser en conséquence pour assumer ce niveau : nous avons recruté car nous étions jusque là « limite » en effectif. Nous avons maintenant 28 joueuses, ce qui est plus confortable et rassurant pour envisager une « bonne » saison. Et nous avons la chance d’avoir des entraîneurs « au top ».
Chez les Féminines, nous n’avons qu’une seule catégorie, les Seniors. Les très jeunes filles qui veulent jouer font leur école de rugby avec les garçons, et le niveau des Cadettes est géré par le Comité Départemental 91. Nous sommes dans une poule de 12 équipes, ce qui implique un rythme très soutenu, et des matchs pratiquement tous les dimanches.
« L’état major » de l’équipe est composé d’un staff d’entraîneurs (Bruno Ghiringhelli et Antoine Gomez, assistés de Pascal Logé), 2 dirigeants (Lionel Monnier et moi-même), et 2 joueuses ont été désignées capitaines d’équipe (Natacha Monnier et Marion Jacquinot).
Au sein de ce staff, quelles sont les missions qui t’incombent personnellement ? Qu’est-ce que tu apprécies le plus dans cette fonction de dirigeante ?
En tant que dirigeants, on s’occupe entre autres des licences, des équipements, de l’organisation des déplacements, des réceptions d’après-matchs, bref… Beaucoup de choses qui concernent la logistique pour le bon fonctionnement de l’équipe.
Les filles, je les connais bien. Certes, je suis dirigeante depuis 3 ans, mais je les connais depuis bien plus longtemps, car Clémence joue maintenant depuis un petit moment… Et il y a forcément un grand attachement qui s’est noué entre nous. J’en ai vu pas mal d’entre elles passer du statut de « jeunes adultes » au statut de « femmes », ce sont vraiment des filles magnifiques et très sympas, avec qui je partage beaucoup, et surtout de la bonne humeur.
Certaines d’entre elles me considèrent, symboliquement, un peu comme leur « maman » au sein de l’équipe, ça me touche beaucoup, même si moi j’ai plutôt tendance à me considérer comme leur « grande sœur » !!!… Il y a en tout cas énormément d’affection réciproque dans tout ça. Et c’est aussi, je pense, ce qui facilite l’accueil et l’intégration des nouvelles: le noyau dur « historique » de l’équipe est très accueillant, et les nouvelles recrues, une bonne dizaine de filles, se sont senties rapidement chez elles dans le club.
Chaque jour passant, le rugby féminin gagne du terrain… Tu expliques ça comment ?
On a longtemps imaginé que le terrain était le territoire des hommes, les « durs », les « vrais », les « costauds »… Et on s’aperçoit aujourd’hui que les filles savent aussi plaquer, qu’elles savent aussi botter en touche, et plein d’autres choses encore ! Et maintenant, elles aussi pratiquent ce sport… Parce que le monde a changé ! On n’est plus dans cette « sectarisation » hommes / femmes, on arrive à faire les mêmes choses.
D’ailleurs, la dernière Coupe du Monde Féminine a été un très bon révélateur. Au début, je crois que personne n’aurait mis une « cacahuète » sur cette compétition, ça se déroulait à Marcoussis, qui ne pouvait pas accueillir beaucoup de monde, et finalement, il y a eu énormément de gens qui n’ont pas pu assister aux matchs. J’étais présente à la finale qui s’est jouée à Jean Bouin, le stade était plein à craquer… Ca a été un superbe évènement !
Il est sûr que certains, qui n’étaient pas forcément « pro-rugby féminin » au départ, ont pu voir d’excellents matchs de rugby, et ont pris du plaisir, parce que, bien sûr, même s’il n’y a pas la même puissance et les mêmes impacts que chez les hommes, il y a beaucoup de technique et de très belles envolées.
Compte tenu du contexte massicois, penses-tu que votre Equipe Féminines a de belles choses à réaliser, et qu’elle peut entrevoir l’avenir avec optimisme ?
Oui, je suis persuadée qu’on a de belles choses à faire, ici à Massy. On à une belle équipe, un staff au top, les entraînements sont hyper-ludiques tout en étant bien sûr sérieux, et les filles qui n’avaient jamais joué ont progressé de façon spectaculaire.
Alors oui, le contexte pour aller plus loin est favorable… Maintenant, la balle est entre nos mains et dans celles du club : Est-ce qu’on a envie d’aller plus loin et d’atteindre le plus haut niveau du rugby féminin ? Est-ce que le club est en mesure d’accepter une éventuelle autre montée ?… Car alors on ne parle plus de la même chose : ce ne sera plus les mêmes déplacements, les mêmes budgets, les mêmes contraintes, le même monde… Autant de questions auxquelles nous devrons, le moment venu, apporter une réponse collective au niveau du club.
Pour l’instant, nous nous sommes fixés des objectifs à court-terme, notamment celui d’accéder aux phases finales, et a minima de nous maintenir quelques années en Fédérale 1, avant d’entrevoir la suite à un plus haut niveau.
Quelles sont les particularités essentielles du rugby féminin ?
Hormis l’aspect « puissance », notamment au niveau des impacts, il y a bien sûr un peu moins de vitesse chez les filles, mais les règles du jeu et le temps de jeu sont exactement les mêmes que chez les garçons.
Et dans le rugby en général, Florence, qu’est-ce qui te plait le plus ?
Ce qui me plaît, dans le rugby, qu’il soit masculin ou féminin, c’est le combat, la sueur, l’abnégation. Je suis à la base une femme de combat, et je n’aime pas baisser les bras. J’ai dirigé une entreprise avec mon mari pendant 30 ans, dans le secteur Pomblerie / Chauffage / Electricité, et « entreprendre », comme le rugby, c’est du combat au quotidien, c’est aller au bout de soi-même, pour l’équipe, en l’occurrence l’entreprise.
Je suis bien sûr très émue de voir nos joueuses recevoir des coups, et parfois se blesser, avoir leur visage marqué, mais je suis tellement fière de voir qu’elles ne lâchent rien, de voir qu’elles se relèvent au plus vite chaque fois qu’elles sont à terre.
Et puis, le rugby, c’est des rencontres, c’est partager des moments privilégiés, c’est rire, c’est pleurer… Dire tout ça peut paraître un peu « basique », mais c’est vrai qu’avec un club de rugby, en particulier un club comme Massy, on a une deuxième famille, et l’exprimer a pour moi un sens tout à fait particulier, car nous venons de vivre, avec mes enfants, un moment très douloureux, et le soutien de tous les membres du club a été réel et « vrai », je tiens ici à les remercier du fond du cœur.
Côté Ville
D’où es-tu originaire, et quand ta route a-t-elle croisé celle de Massy et de l’Essonne ?
Je suis une vraie Parisienne, de la rue Montorgueil, dans le 1er arrondissement, où j’ai grandi jusqu’à l’âge de 6 ans, avant d’arriver dans l’Essonne.
Massy, Essonne, Région Parisienne… Ceux de la Province disent que la vie est stressante ici. Mais il y a sûrement des bons cotés, non ?
J’aime la vie, j’aime le monde, je crois que je n’aurais pas supporté de vivre dans un endroit isolé… Il faut que tout me soit accessible, et c’est la chance que nous avons ici.
Après, ce que je pense du stress, c’est qu’il n’a pas de frontière : on peut en être victime partout, que l’on vive à Paris ou au milieu de nulle part… Parce que la vie est comme ça.
Y-a-t-il d’autres régions de France pour lesquelles tu as un faible ?
J’adore La Rochelle… Quand j’y vais, je me sens bien, je me sens chez moi, alors que je n’y ai jamais vécu. J’aime cette ville, son ambiance.
Et puis bien sûr j’aime bien aller dans le sud, pour aller voir mon fils du côté de Six-Fours-Les-Plages, tout proche de Toulon.
La Rochelle | Le Brusc, hameau de Six-Fours-Les-Plages |
Quelle activité professionnelle exerces-tu ?
Je suis Assistante dans un Comité d’Entreprise de 1.000 salariés, et je m’occupe donc de toute la partie sociale, notamment l’organisation d’évènementiels… Cela me plaît car je crois que j’ai un côté social très développé.
Si on laisse le rugby et le boulot de coté, quels sont tes principaux centres d’intérêt dans tes moments de loisirs ?
Le rugby est très chronophage pour moi : le samedi c’est les Seniors pour suivre leurs exploits au stade Ladoumègue, le dimanche c’est les Féminines… Tout tourne autour du rugby, qui franchement me le rend bien.
Et puis sinon, j’adore cuisiner.
Et si tu devais absolument m’indiquer une musique ou une chanson que tu aimes… Ce serait laquelle ?
Je suis très nostalgique pour tout ce qui est musical… J’adore Bill Deraime, Charlelie Couture, j’écoute les Pink Floyds, Cat Stevens… Et s’il y en a qu’une, je choisirai « Wild world » de Cat Stevens.
Wild world- Cat Stevens
Site Internet du Rugby Club Massy Essonne
Envoyez un message à Florence Gihr Jannetta
Interview : Frédéric Poulet
Photos Rugby : RCME – BG / Portrait Florence : FP / Vues La Rochelle et Six-Fours-Les-Plages : Fotolia /
Fred POULET
Merci pour tes encouragements Céline… C’est exactement ça, tu as tout dit, et nous allons continuer !
Céline
Très beau portrait!!!
Il est bon de mettre en avant les bénévoles qui s’investissent humainement en donnant de leur temps et de leur énergie, félicitations pour l’initiative!
Merci au rugby qui est pour beaucoup dans l’épanouissement et l’équilibre des gens que j’aime.
Bravo aux femmes qui ont su gagner du terrain pour faire évoluer le niveau de jeu de ce sport et contribuer à changer le regard sur le rugby féminin!