Jeudi - 21 Novembre 2024

Alain Buzzighin / Agenais Champion de France en 76


Cet homme n’a joué que 10 ans au rugby, mais cela lui a grandement suffi pour rafler 3 fois la mise sous le maillot du SU Agen : Champion de France Junior en 69, Champion de France Nationale B en 73, et puis, consécration suprême… Champion de France en 76, en arrivant à bout de l’insatiable Béziers de l’époque!

Mais pour Alain Buzzighin, bien plus que les titres gagnés et les boucliers soulevés, ce qui demeure le plus important de cette formidable décennie, c’est l’amitié forgée au fil des saisons avec ses copains Agenais sur le pré d’Armandie… Une amitié qui, aujourd’hui encore, réunit chaque année tous les « Héros de 76 » en souvenir de leurs exploits passés et, chaque semaine, quelques-uns d’entre eux autour d’un tapis vert pour y battre les cartes et passer d’agréables moments… Merci beaucoup Alain !

 

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Bonjour Alain, un jour, ta route a croisé celle du rugby… Tu peux nous raconter ?


Bruch, Lot-et-Garonne (47)


panneau bruchJ’ai grandi à Bruch, un village situé à une vingtaine de kilomètres à l’ouest d’Agen. A la sortie du Lycée Technique d’Agen, j’ai commencé à travailler dans un bureau d’études, et Pixaway- realworkhard 195642_640je n’étais pas destiné au rugby… Mais alors ce qui s’appelle pas du tout ! Je n’avais jamais pratiqué aucun sport, et figure-toi que je n’étais même jamais allé au stade, car je ne suis pas né dans une famille de rugbymen… A l’époque, dans les années 60, dans les campagnes, le sport, c’était plutôt dans les champs, et pas dans les tribunes !

logo su agenEt puis là, au boulot, je rencontre Michel Dadalt, qui jouait en Juniors au SU Agen et qui me dit : « Avec la taille que tu fais, tu devrais venir jouer avec nous… ». Moi, le rugby, je ne connaissais pas, et je n’étais pas plus motivé que ça au début, mais il a insisté et il a réussi à me convaincre… J’y suis allé pour voir, et bien évidemment, j’y suis resté !

Compte tenu de mon gabarit, on m’a très rapidement fait jouer en 2ème ligne, où je faisais la paire avec Guy Pincin, et j’ai trouvé ça tellement bien qu’un an plus tard, en 1969, je me suis retrouvé Champion de France Juniors avec tous mes nouveaux copains.

 

Bon, et à partir de cet instant fondateur… Il s’est passé quoi ensuite, entre le rugby et toi ?

Ma carrière rugbystique va très exactement durer 10 ans, puisque j’ai joué de 18 à 28 ans, et toujours sous les couleurs du SU Agen… Période durant laquelle j’ai eu le grand bonheur d’être 3 fois Champion de France : donc en 69 avec les Juniors, puis en 73 avec la Nationale B, et enfin en 76 avec l’Equipe 1ère .

Alain action 1 beaumont

Contre Beaumont-de-Lomagne, Alain sonne la charge des Agenais, soutenu par (de g à d) : Pierre Lacroix, Jean-Pierre Pin, Alain Plantefol, Yves Sallès et J.Claude Avi

Alain action 2 bègles

Contre Bègles, Alain soutenu par M.Couturas et A.Plantefol

 

Après, j’ai tiré un trait, car beaucoup de mes potes terminaient leur carrière en même temps (Serge Lassoujade, René Bénésis, Alain Plantefol, etc…)… On était en 77, j’aurais pu faire encore 2 ou 3 saisons, mais pour moi, c’était l’amitié et la convivialité qui primaient avant tout dans ce jeu de rugby… Et là, tout d’un coup, je n’avais plus mes copains sur le pré… Alors j’ai décidé d’arrêter moi aussi.

 

 

 

 

Des bons souvenirs de rugby, tu en as forcément des milliers, mais il y a fort à parier que le Brennus remporté en 76 contre Béziers est l’un de tes plus beaux… Presque 40 ans après, tu peux nous le raconter un peu ce match ?

Alain action 3 béziers

Avant cette finale, Agenais et Biterrois s’étaient déjà rencontrés… de g à d : R.Astre, Alain, et S.Lassoujade

Oui bien sûr, avec plaisir ! On était coachés par Marceau Ambal, et cette finale était pour nous le terme d’une belle saison 75/76 au cours de laquelle nous avions décroché le bouclier d’automne à Toulouse. Mais avant d’en arriver là, on avait frisé la correctionnelle en 1/8ème contre Nice, qu’on élimine à l’issue d’un score final de 12 à 12… A la dernière minute, alors qu’on croyait que c’était cuit pour nous, Claude Lacaze manque une pénalité pour Nice en face des poteaux… Et finalement on gagne, en ne devant notre salut qu’au seul fait qu’à cette époque la pénalité primait sur le drop !

On élimine ensuite Romans en ¼ , puis Narbonne en ½ , et on se retrouve donc le 23 mai 1976 au Parc des Princes en finale contre l’AS Béziers. C’était l’époque du « Grand Béziers » (celui des Vaquerin, Paco, Palmié, Estève, Astre, Cabrol, Cantoni et tous les autres…), tenant du titre, et qui avait déjà été Champion 4 fois au cours des 5 dernières saisons…

année 76Je me souviens que, comme ils étaient habitués aux finales depuis de nombreuses années, les Biterrois avaient réservé tous les avions du sud-ouest pour amener leurs supporters à Paris… Et nous, on a pu trouver in extremis un avion de la Compagnie « Air Rouergue », qui n’existe plus aujourd’hui, mais qui, dans les années 70, reliait Paris au départ de Rodez avec des avions à hélices. A Paris, on était hébergés au Centre Shell à Rueil-Malmaison, où on a passé 2 jours à se reposer, sans vraiment de préparation particulière…

soleil pixabay ClkerFreeVectorImagesA l’époque les finales se jouaient le dimanche après-midi, il faisait très chaud en cette fin mai 76 (ndlr : pour mémoire, 76 fut une année de sécheresse sévère…), et le dimanche matin, Alain Plantefol, notre capitaine, nous a dit : « Et si on allait boire un petit blanc en ville ? »… Et on y est allé ! Si tu racontes ça maintenant, les gens ne te croiront pas… Mais c’était ça le rugby « d’avant » !

Contre Béziers, on n’était donc pas favoris avant le coup d’envoi, et ce fut un match très dur…

Je crois que si on le refait 100 fois, on ne le gagnera que 2 fois ! Mais on s’y est mis, on s’est relevé les manches, on s’est vidé les tripes. Beaucoup d’entre nous avions déjà été Champions ensemble, en Juniors en 69 et/ou en Nationale B en 73 (les Nieucel, Cazaubon, Bernès, Mazas, Fongaro, etc…)… On était pour la plupart tous issus du « canton » agenais… Autant dire qu’on se connaissait bien et qu’on le voulait ce titre! A l’issue du temps réglementaire, il y avait 10 à 10, ce qui donna lieu à des prolongations… 2 fois 20 minutes supplémentaires!

C’est à partir de ce moment là que les Biterrois ont commencé à baisser la tête, car ils étaient, je pense, moins préparés que nous au rythme imposé… On envoyait tous les ballons derrière… Ça courait de partout, et en les asphyxiant et en désorganisant leur jeu, on est arrivé peu à peu à prendre le dessus sur eux. Enfin, c’est une pénalité de Jean-Michel Mazas qui nous fera gagner cette finale sur le score de 13 à 10, et nous donnera le droit de soulever le bouclier de Brennus !

gants de boxeMais là, je ne pourrai plus trop te donner de détails, car je n’ai pratiquement aucun souvenir de la fin du match et des premières heures qui ont l’ont suivi… Le combat était âpre et dans les 5 dernières minutes de la partie, j’en ai pris une qui m’a complètement sonné ! Je ne me suis tout à fait « réveillé » que du côté de Castres (je crois !), escale à laquelle « Air Rouergue » a dû faire le plein sur le chemin du retour… A l’époque le « protocole commotion » n’existait pas ! J’étais groggy debout, je n’ai gardé qu’un vague souvenir des vestiaires, de la buée et de l’ambiance panneau castresqui y régnaient, des gars qui plongeaient dans les bassins d’eau, du champagne qui coulait de partout… Mais je ne sais plus si tout ça je l’ai vraiment vécu ou pas !

 

Tu étais associé à Alain Plantefol pour former la 2ème ligne du SU Agen… Et je crois savoir que vous cultivez toujours tous les 2, ainsi qu’avec d’autres des « Héros de 76 », une amitié fidèle…

Alain action 4 toulouse

Les 2 « Alain », Buzzighin (à gauche) et Plantefol, jadis réunis en blanc dans la 2ème ligne agenaise pour combattre son homologue toulousaine…

Ca fait bientôt 40 ans qu’on a été Champions de France ensemble, depuis on ne s’est jamais quittés, et on a toujours autant de plaisir à se côtoyer. On est d’ailleurs quelques uns (notamment les plus assidus que sont Alain Plantefol, Henri Cazaubon et moi) à se réunir toutes les semaines pour jouer à la belote, manger, discuter, rigoler et, finalement, continuer simplement à partager des moments d’amitié… Pour moi, c’est ça que le rugby m’a donné de plus important.

alain et belote

… Et s’affrontant aujourd’hui à la belote, arbitrés par H.Cazaubon!

On se retrouve au restaurant « L’Etable », à Agen, dirigé par Dominique Ferrero, qui est un spécialiste du canard et du foie gras, et à qui j’adresse un amical salut à travers mon portrait « Puissance 15 » !

Et puis, tous les ans, depuis longtemps déjà, on essaie de réunir toute l’équipe championne de France en 76, et pour joindre l’agréable à… L’agréable !, on fait ça à l’occasion d’un match d’Agen à la maison, ce qui nous permet d’aller tous ensemble au Stade Armandie. Missionné par notre capitaine Plantefol, c’est moi qui suis chargé du « secrétariat » de cette réunion annuelle. La première chose que je fais, c’est d’envoyer le programme des matchs à Gérard Guidi, qui habite à L’Ile Maurice, et de lui demander quelle est la meilleure date de venue pour lui… Et finalement, c’est lui qui fixe le timing de nos rencontres !

Christian Viviès sert Alain, sous l’œil de Léo Lacroix…

Christian Viviès sert Alain, sous l’œil de Léo Lacroix…

Oui, ce sont vraiment de bons moments que nous passons, avec le souvenir bien ancré de ce que nous avons réalisé tous ensemble en ce mois de mai 1976, et je voudrais ici aussi particulièrement honorer la mémoire de Christian Viviès, qui nous a hélas quittés il y a 3 ans.

 

 

 

Alain, tu es aujourd’hui à la retraite, mais quelle a été ton activité professionnelle ?

logo ville agenJ’ai quasiment fait toute ma carrière professionnelle comme technicien dans un bureau d’études des Services Techniques de la Mairie d’Agen, et depuis quelques années maintenant, je suis effectivement un heureux retraité !

 

Tu habites à Laplume, à une quinzaine de kilomètres d’Agen… Et tu connais mieux que quiconque la région, puisque c’est là que tu as toujours vécu… Si on vient te voir là-bas, quelle curiosité locale nous feras-tu visiter en priorité… Et où irons-nous déguster quelques spécialités du coin ?

Une des principales curiosités de notre ville, c’est le « Pont-Canal d’Agen », datant du 19ème siècle et d’une longueur totale de 540 mètres. Il permet de faire passer la navigation au-dessus de la Garonne par le Canal de Garonne, sur 23 arches… C’est le seul pont-canal qui enjambe la Garonne.

Pont Canal Agen Wikipedia Mike Peel

Le « Pont-Canal » enjambe la Garonne à Agen…

Et puis on ira bien sûr au Stade Armandie voir jouer le SU Agen… Il y a une belle ambiance dans les bodegas installées les soirs de matchs, et encore plus, bien sûr, quand la victoire est au rendez-vous… Certes cette saison il y en a moins que l’an dernier en PRO D2, mais il faut bien reconnaître que le TOP 14 est devenu extrêmement compliqué pour des villes de 30.000 habitants comme la nôtre…

Quand aux spécialités locales, comme entre autres le canard et les pruneaux, nous irons bien sûr les déguster à « l’Etable », car chez Ferrero, il y a vraiment tout ce qu’il faut pour se régaler!

 

C’est Gérard Guidi, lui aussi « Héros de 76 », qui t’a fait une lointaine passe depuis l’Ile Maurice où il est installé, pour t’inviter à pousser avec nous dans la « Mêlée Puissance 15 »… Quel message lui adresses-tu en retour, et à qui vas-tu faire la passe à ton tour, pour faire vivre ce ballon ?

gérard finale agen béziers

Clin d’oeil à Gérard Guidi

Ah ! Gérard c’est un super mec, qui peut être fier de ce qu’il a réalisé, mais je sais qu’il est trop modeste pour être fier… Je le remercie pour sa passe et je lui dis que j’ai hâte qu’il me fixe la date de sa prochaine venue en France pour que je puisse lancer un appel à tous les Agenais de « 76 »… Et j’espère bien d’ailleurs que tu seras toi aussi des nôtres, tu es le bienvenu !

Et cette passe, il y en a bien sûr quelques uns à qui j’aimerais vraiment la faire, comme à mes amis Plantefol et Cazaubon par exemple, et ce témoignage que je t’apporte aujourd’hui, je le partage volontiers avec eux… Mais pour continuer à faire voyager un peu ce ballon, on va l’envoyer dans l’Aude, du côté de Gruissan, à destination de René Bénésis… Je suis sûr qu’il aura, entre autres, plein d’histoires de Gallois et autres Britanniques qu’il a croisés dans sa carrière, à te raconter…


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Site Internet du SU Agen Lot-et-Garonne


ICONE-CREDITSInterview : Frédéric Poulet
Photos : Photo « Une » d’Alain: AB / Photos « rugby »: Archives d’Alain, La Dépêche du Midi / Photo Pont-Canal : Wikipedia Mike Peel / Champ de blé : Pixabay- realworkhard 195642_640 / Soleil : Pixabay ClkerFreeVectorImages

 


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